La question revient, lancinante et angoissante. Depuis la cinquième et ultime victoire de Bernard Hinault en 1985, la France attend un successeur. Mais poser la question n’est au fond qu’un artifice mélancolique dont la crédibilité existentielle prend désormais la forme d’une insatiable crédulité.

Éric Richard se pose et nous pose la question. Avec la participation de trois des derniers vainqueurs français. Lucien Aimar, Bernard Thévenet et Bernard Hinault. Ne manque, hélas, que le regretté Roger Pingeon…

Pour étayer son analyse, il prend appui sur l’histoire du Tour. Avec la mise en perspective réjouissante des épopées ayant forgé la légende du maillot jaune. De Garin à Bobet, d’abord. De la naissance de la grande boucle jusqu’aux prémices lumineux de sa gloire éternelle.

On côtoye le métaphysique Bottecchia, le premier grand grimpeur de l’histoire. On retrouve Vietto le Roi René. On entre enfin dans l’univers des Campionissimi, avec Gino Bartali et Fausto Coppi.

On entre enfin dans l’époque moderne, avec le même Fausto Coppi et avec Louison Bobet. Tous deux pluri-vainqueurs du Tour et co-inventeurs du nouveau cyclisme.

Avec Bobet et Anquetil pourrait naitre le premier grand duel de l’histoire du cyclisme français. Mais il n’en sera rien finalement. Et c’est le même Anquetil, désigné par le Campionissimo Coppi comme son successeur, qui trouvera en Raymond Poulidor, idole de la France profonde, le partenaire idéal pour alimenter sa gloire éternelle.

Tous ces rappels, tous ces flash-backs nous ramènent à la sacro-sainte question. « Y a-t-il encore un Français pour gagner le Tour de France ? »

Hinault, Thevenet et Aimar s’y collent. Pour Hinault, c’est clair. “ Si aucun coureur français ne m’a succédé au palmarès du Tour, c’est d’abord parce qu’il n’y a pas eu chez nous ces dernières décennies de super champion qui fait la différence. » Pour Thévenet, il s’agit de parler de l’absence de gros moteurs dans le peloton français. Surtout face aux super champions que sont Bernal ou Pogacar. Pour Aimar, plus optimiste, la chance peut aider un Alaphilippe à s’imposer. Mais il sait que la chance ne peut suffire…